La crainte du jugement nous limite. Elle amène souvent une retenue. Nous avons tous déjà porté un jugement sur l’action ou l’inaction d’un autre parent. Quand on a un enfant avec des besoins particuliers, il faut apprendre à mettre cette crainte de côté afin de pouvoir l’accompagner dans ses défis. Laissez-moi vous dire que ce n’est pas toujours facile!
L’été dernier, avant qu’on identifie officiellement la dyspraxie de mon fils, nous l’avons inscrit au soccer. L’activité sportive idéale à 4 ans! Elle permet de socialiser avec d’autres enfants tout en mettant les bases du sport.
J’étais naïve en pensant que j’irais m’asseoir sur le bord du terrain pour encourager mon fils. J’étais à mille lieues de penser que je me retrouverais finalement au cœur de l’action.
Rapidement, la différence s’est fait sentir. Mon fils ne cadrait pas avec le joueur de 4 ans typique. Il était figé. Il regardait les autres, mais il n’avait aucune idée de ce qui était attendu de lui. Il refusait d’aller sur le terrain seul. Au fin fond de moi, je savais que ce n’était pas un caprice.
Alors, j’ai pris sa petite main et je l’ai accompagné.
La première partie de la pratique de soccer consiste à se réchauffer avec des petits jeux. Des petits jeux qui nécessitent un repérage dans l’espace. Mon fils ne comprenait pas à quel endroit il devait se placer ni ce qu’il devait faire. Il avait beau regarder les autres enfants, il ne saisissait pas le sens des jeux. Après coup, je réalise que c’est un des défis qu’amène la dyspraxie. Alors, je l’ai accompagné.
Je lui ai expliqué le jeu « 1,2,3 soleil ». Nous avons participé ensemble, main dans la main.
Je lui ai expliqué le jeu du bouledogue. Nous avons participé ensemble, main dans la main.
Je lui ai expliqué le jeu de la statue. Nous avons participé ensemble, main dans la main.
Au fil des semaines, mon fils gagnait en confiance. J’ai doucement lâché sa main et je l’attendais à l’autre bout du terrain. Chaque fois qu’il y arrivait, ses yeux brillaient.
La deuxième partie de la pratique consiste à exécuter des exercices d’habiletés. Souvent sous forme de parcours ou de course à relais, les entraîneurs faisaient travailler le contrôle du ballon, les jeux de pieds, de la course et des lancers au but. Bref, en d’autres mots, beaucoup de coordination!
Alors, je lui ai expliqué chaque étape de chaque parcours et je l’ai guidé.
Au lieu de dire : « fais le zigzag entre les cônes avec le ballon», je disais : « passe le ballon dans chaque porte. »
Au lieu de dire : « cours en contrôlant le ballon jusqu’au cône », je disais : «donne des petits coups de pied doux sur ton ballon jusqu’au cône ».
Au fil des semaines, mon fils gagnait en confiance. Il travaillait si fort pour réussir. Quand il réussissait un nouveau parcours, ses yeux brillaient.
La troisième partie consiste à jouer une partie. Je pense que c’est à ce moment que d’oublier le regard des autres a été le plus difficile. Jusque-là, le fait que je sois sur le terrain ne causait pas tant de différence puisqu’il y avait aussi les entraîneurs et les parents bénévoles à la gestion des enfants.
Un des défis qu’amène la dyspraxie est l’organisation et le repérage spatial. Donc, comprendre le but derrière un sport tel le soccer est extrêmement difficile. Mon fils errait sur le terrain sans comprendre ce qui était attendu de lui. Tout allait trop vite.
Alors, je l’ai aidé. J’ai mis ma main dans son dos et je le poussais dans les bonnes directions. Je courais avec lui. Je l’amenais au milieu de la mêlée. J’étais un des seuls parents au milieu de tous les enfants de 4 ans. Chaque semaine, je me retrouvais au milieu de la partie de soccer à guider mon enfant dans les bonnes directions, à l’encourager à foncer vers le ballon. J'avais souvent l'impression que les jugements pleuvaient dans mon dos. Est-ce que c'était dans ma tête? Sûrement, mais ça reste que je luttais contre ce sentiment durant toute la partie.
Vers la fin de l’été, il a pris un peu confiance. Il s’est, à un moment, risqué lui-même et a foncé vers le but avec le ballon et a compté. Euphorique ne rend pas justice à mon excitation du moment. Si j’avais pu, je l’aurais pris sur mes épaules et je lui aurais fait faire le tour de la victoire. Il était vraiment fier!
C’est un exemple parmi tant d’autres où je dois apprendre à faire abstraction du jugement des autres. Mon enfant a des défis. Mon rôle est de l’aider à cheminer, peu importe le moyen que je dois prendre pour lui faire comprendre ce qui lui cause problème. Ce n’est pas toujours facile. Mon enfant ne fait pas un caprice quand il refuse de collaborer. Je ne le surprotège pas quand je l’accompagne. Je réponds à son besoin et je m’assure qu’il puisse vivre des réussites. Ces accomplissements forgeront son caractère et son désir de persévérer quand il rencontrera d’autres obstacles.
Donc, j’apprends à faire fi du jugement des autres. Ce n’est pas toujours facile, mais on dit toujours que le ridicule ne tue pas!
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